En 1996, Michael Jackson a joué devant un public plein à craquer à Mumbai dans ce qui devait être son seul spectacle en Inde.
Quelque 35 000 fans ont assisté au spectacle dans une arène sportive le premier jour de novembre. Le concert de 17 chansons de Jackson à Mumbai (alors appelé Bombay) faisait partie de sa tournée mondiale History World Tour de 83 spectacles de septembre 1996 à octobre 1997.
À l’époque, le Maharashtra, l’État où se trouve Mumbai, était gouverné par le parti de droite Shiv Sena. Il avait renoncé à la taxe sur les divertissements pour le spectacle au motif qu’il était destiné à un but « philanthropique et charitable ».
Mais le spectacle s’est rapidement retrouvé mêlé à une longue bataille juridique impliquant le gouvernement, l’organisateur du concert et un groupe fougueux de protection des consommateurs. L’enjeu était de savoir si le spectacle était éligible à une exonération fiscale et même comment la musique de Jackson pouvait être définie.
Jackson avait « pour des raisons connues de quelques-uns seulement, renoncé à son droit de représentation », rapportait le magazine India Today en novembre 1996.
La superstar de la pop avait promis de faire don des bénéfices du concert – qui s’est finalement élevé à plus d’un million de dollars – à un projet d’emploi pour les jeunes géré par le Shiv Sena, a écrit l’auteur Suketu Mehta dans son livre primé, Maximum City.
Mais un groupe de protection des consommateurs appelé Mumbai Grahak Panchayat a rapidement contesté la renonciation devant la Haute Cour de Bombay.
« Juste avant la tenue du concert, le gouvernement avait augmenté la taxe de vente sur les médicaments. Nous avons dit comment pouvez-vous augmenter les taxes sur les médicaments et rendre exempt de taxes un concert de musique auquel assistent les personnes aisées. Les billets coûtaient jusqu’à 5 000 roupies , ce qui était très raide pour l’époque », a déclaré à la BBC Shirish Deshpande, président du Mumbai Grahak Panchayat.
En Inde, les taxes sur le divertissement sont généralement supprimées pour certains films et spectacles afin de rendre les billets moins chers. Le concert de Jackson se transformant en une collecte de fonds, cette renonciation profiterait à la société privée de gestion d’événements et au projet d’emploi des jeunes soutenu par le parti au pouvoir, selon les rapports.
Le tribunal a répondu à la requête du groupe de consommateurs en gelant plus de 30 millions de roupies de ventes de billets du concert, en suspendant la renonciation et en demandant au gouvernement d’examiner son bien-fondé. Il y a même eu un début de débat sur la question de savoir si la musique pop devait bénéficier de faveurs fiscales.
Vingt-quatre ans après le concert et de nombreuses audiences judiciaires plus tard, le gouvernement actuel du Maharashtra, désormais dirigé par le Shiv Sena en coalition avec le parti du Congrès, a rétabli la renonciation.
Le ministre de l’État Subhash Desai a déclaré mardi soir que le cabinet avait adopté une résolution pour « renoncer à 3,3 millions de roupies de taxe sur les spectacles pour le concert de Michael Jackson en 1996 ». L’argent est susceptible d’être maintenant réclamé par l’organisateur de l’événement privé, selon les rapports.
« Nous voudrions que l’argent soit déposé auprès du gouvernement puisque l’organisme de bienfaisance n’existe plus », dit M. Deshpande.
Pour les fans de musique indiens, le spectacle de Jackson était un concert rare d’une pop star.
Un magnat basé à Mumbai a prêté sa décapotable à Jackson, et dans un hôtel de luxe de la ville, Jackson « a demandé un miroir en pied et en pied dans la chambre et il l’a signé au moment de son départ », selon les médias.
Jackson a également visité la maison de Bal Thackeray, le fondateur controversé du Shiv Sena. Thackeray – son père a anglicisé son nom de famille d’après William Makepeace Thackeray, auteur anglais de Vanity Fair – a dirigé le parti nativiste pendant plus de quatre décennies avant sa mort en 2012, à l’âge de 86 ans.
Jackson avait un grand nombre de fans en Inde, et des milliers de fans se sont rassemblés à l’aéroport de Mumbai pour l’accueillir. « Je me souviens qu’il est descendu de son jet privé et que son entourage est arrivé dans quatre autres avions. L’aéroport s’est arrêté pendant une heure avec les officiers, l’équipage des avions et les passagers venus l’accueillir », aurait déclaré l’un des organisateurs du concert.
Mais des tensions se préparaient au sein du parti Shiv Sena. L’opposition a attaqué le gouvernement, demandant comment un parti de droite hindou pouvait soutenir un concert pop qui « représentait les valeurs occidentales ».
Certains dirigeants du Shiv Sena ont estimé que le concert avait des « touches d’obscénité ». Les dirigeants appartenant à l’allié du parti, le nationaliste hindou BJP, ont été « priés de rester à l’écart du spectacle », a rapporté India Today.
« Jackson nous a éloignés. Jackson est-il plus important pour le Sena que notre relation politique ? » aurait déclaré un dirigeant anonyme du BJP au magazine.
Thackeray a vigoureusement défendu la superstar de la pop.
« Jackson est un grand artiste, et nous devons l’accepter en tant qu’artiste. Ses mouvements sont terribles. Peu de gens peuvent bouger de cette façon. Vous finirez par vous casser les os », aurait-il dit selon Suketu Mehta dans son livre.
« Et puis, qu’est-ce que la culture ? Il représente certaines valeurs en Amérique que l’Inde ne devrait pas avoir de scrupules à accepter. Nous devrions aimer accepter cette partie de l’Amérique qui est représentée par Jackson. »
Jackson est mort à Los Angeles, à l’âge de 50 ans, en juin 2009, son héritage assombri par des allégations d’abus sexuels sur des enfants.
En 1996, lors d’une soirée douce à Mumbai, le spectacle au stade de sport a été un succès spectaculaire. Un fan s’est souvenu de Jackson « faisant le tour du stade en hélicoptère, puis faisant son entrée depuis une fusée ». Un fan de 15 ans se souvient avoir été appelé sur la scène pour danser avec Jackson.
Un journaliste qui couvrait l’événement a déclaré à Conde Nast Traveller : « Ceux qui ne pouvaient pas entrer bloquaient les rues à l’extérieur. C’était l’époque où les normes de contrôle du bruit étaient encore laxistes, et on pouvait entendre sa musique à des kilomètres. Les gens devenaient fous – ils chantaient et dansaient dans les rues. »
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