Discussion

Ces dernières années, le terme spondyloarthropathie a été largement remplacé par les catégories de maladies de SpA axiale et périphérique. Cette nomenclature met l’accent sur la nature inflammatoire de la maladie (d’où l’accent mis sur la SpA) et sur le fait que les patients présentant une atteinte articulaire axiale ou périphérique ont tendance à avoir des antécédents génétiques différents (association HLA-B27 avec la maladie axiale) ainsi que des manifestations cliniques différentes. Les affections rhumatologiques qui peuvent se présenter sous la forme d’une SpA axiale comprennent la spondylarthrite ankylosante (SA), le rhumatisme psoriasique, l’arthrite associée à une maladie intestinale inflammatoire, l’arthrite réactive et la SpA indifférenciée. Au cours de la dernière décennie, des critères de classification révisés pour la spondylarthrite axiale ont été élaborés, car les anciens critères reposaient généralement sur des preuves radiographiques de la maladie qui mettaient de nombreuses années à se développer.1,2 La Société internationale pour l’évaluation de la spondylarthrite (ASAS) a élaboré de nouveaux critères de classification qui intègrent des techniques d’imagerie modernes (telles que l’imagerie par résonance magnétique, dont on sait qu’elle est plus sensible que les radiographies simples pour détecter une atteinte précoce) ainsi que des manifestations extra-articulaires, dans le cadre du schéma de classification. Des exemples de manifestations extra-articulaires dans les nouveaux critères incluent l’uvéite, la positivité HLA-B27, le psoriasis et les maladies inflammatoires de l’intestin.

Selon les nouveaux critères de classification, la SpA axiale comprend deux sous-types : la spondyloarthrite axiale non radiographique (nr-axSpA) et la SpA axiale radiographique (ou AS). Les deux répondent aux critères de la spondylarthrite axiale proposés par l’ASAS, sauf que le premier ne présente pas de preuve radiographique de sacroiliite. La nouvelle classification du nr-axSpA permet un diagnostic et un traitement plus précoces des patients présentant des signes de la maladie mais ne présentant pas de signes radiographiques classiques. Cependant, le débat se poursuit pour savoir si ces sous-types sont des entités distinctes ou un spectre de la même maladie.

Les études ont montré des similitudes et des différences entre ces deux groupes. La prévalence estimée des deux sous-types est similaire, soit 0,35 %, d’après des données rétrospectives provenant de cabinets de rhumatologie américains.3 Les autres similitudes partagées entre les deux sous-types sont la prédisposition génétique (HLA-B27), la présence d’arthrite périphérique et de manifestations extra-articulaires, ainsi que les scores de qualité de vie rapportés par les patients.4,5 En outre, des résultats et une adhésion similaires au traitement par le facteur de nécrose tumorale (TNF) ont également été signalés dans les deux sous-types.6 Cela renforce le postulat selon lequel les deux sous-types peuvent représenter différentes phases de la même maladie. En revanche, les patients atteints de nr-axSpA sont plus jeunes, plus souvent des femmes, ont des niveaux plus faibles de protéine C-réactive et présentent une maladie plus légère, telle que définie par les scores d’évaluation globale dérivés du clinicien, par rapport à la SA.4-6 Ces données suggèrent que le nr-axSpA pourrait être une maladie distincte et plus légère que la SA. Des études supplémentaires sur le nr-axSpA sont nécessaires pour mieux définir ce sous-groupe de patients et déterminer sa relation avec la SpA axiale radiographique.

Le traitement de la SpA axiale comprend diverses thérapies non pharmacologiques et non biologiques en première intention. Une méta-analyse récente a montré que l’exercice régulier était associé à de légères améliorations de l’activité de la maladie, et que l’utilisation d’AINS était liée à une amélioration des symptômes et à une diminution de la progression radiographique par rapport au placebo.7 Les antirhumatismaux biologiques modificateurs de la maladie, y compris les inhibiteurs du TNF et les traitements dirigés contre l’IL17 (sécukinumab), représentent de bonnes options thérapeutiques pour les patients ayant une réponse inadéquate à la monothérapie par AINS. Les inhibiteurs du TNF sont efficaces pour les deux sous-types de SpA axiale, avec un nombre nécessaire à traiter pour obtenir une réponse ASAS40 allant de 2,6 à 5,2 pour la SA et de 2,3 à 5,4 pour la nr-axSpA.8

Dans notre cas, le patient présentait plusieurs des critères définis par le groupe ASAS et a donc été classé comme SpA axiale. La présence d’une fusion bilatérale de l’articulation sacro-iliaque, de syndesmophytes bilatéraux et marginaux (fins), ainsi que l’absence de maladie inflammatoire intestinale connue, d’infection précédente ou de psoriasis, s’alignent le mieux avec un diagnostic traditionnel de SA. La présence d’une maladie cutanée (en particulier la kératodermie blénorragique et la PPP) a soulevé la question d’une arthrite réactive ou d’un rhumatisme psoriasique sous-jacents, respectivement. Or, ces affections entraînent classiquement une atteinte unilatérale de l’articulation sacro-iliaque ainsi que des syndesmophytes unilatéraux et épais (syndesmophytes en  » anse de jugulaire « ). En outre, aucune infection antérieure claire n’a pu être identifiée dans notre cas.

En définitive, les observations cutanées dans ce cas ont été fortement suspectées d’être associées au diagnostic sous-jacent de SpA axiale. Cette suspicion clinique était étayée par la réponse cutanée remarquable au traitement anti-TNF, bien que récalcitrante à de nombreuses approches topiques. Les patients atteints de SA ne sont pas couramment rapportés comme ayant des manifestations cutanées associées, mais il est important de reconnaître que les SpA sont un ensemble de maladies rhumatologiques, souvent avec des caractéristiques cliniques partagées, mais qui se chevauchent.

Ce cas souligne l’importance d’une histoire et d’un examen approfondis chez les patients atteints de dermatite réfractaire et rappelle au clinicien de reconsidérer le diagnostic lorsque la réponse au traitement n’est pas celle attendue. Le fait de prendre le temps de décrire les échecs thérapeutiques antérieurs et les antécédents d’exposition, de documenter les antécédents d’uvéite et d’observer les résultats de l’examen suggérant une maladie musculo-squelettique a permis de poser le bon diagnostic pour ce patient. Comme Sir William Osler l’a fait remarquer avec perspicacité il y a plus de 100 ans, « écoutez toujours le patient, il pourrait vous dire le diagnostic »

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