Les mitogènes sont importants dans la recherche sur le cancer en raison de leurs effets sur le cycle cellulaire. Le cancer est en partie défini par un manque ou une défaillance du contrôle du cycle cellulaire. Il s’agit généralement de la combinaison de deux anomalies : premièrement, les cellules cancéreuses perdent leur dépendance aux mitogènes. Deuxièmement, les cellules cancéreuses sont résistantes aux anti-mitogènes.
Indépendance aux mitogènesModifié
Plutôt que de nécessiter des mitogènes endogènes ou externes pour poursuivre le cycle cellulaire, les cellules cancéreuses sont capables de croître, de survivre et de se répliquer sans mitogènes. Les cellules cancéreuses peuvent perdre leur dépendance aux mitogènes externes par une variété de voies.
Premièrement, les cellules cancéreuses peuvent produire leurs propres mitogènes, un terme appelé stimulation autocrine. Cela peut aboutir à une boucle de rétroaction positive mortelle – les cellules tumorales produisent leurs propres mitogènes, qui stimulent d’autres cellules tumorales à se répliquer, qui peuvent alors produire encore plus de mitogènes. Prenons l’exemple de l’un des premiers oncogènes identifiés, le p28sis du virus du sarcome simien, qui provoque la tumorigenèse chez l’animal hôte. Les scientifiques ont découvert que la p28sis a une séquence d’acides aminés presque identique à celle du facteur de croissance dérivé des plaquettes (PDGF) humain. Ainsi, les tumeurs formées par le virus du sarcome simien ne dépendent plus des fluctuations du PDGF qui contrôlent la croissance des cellules ; au contraire, elles peuvent produire leurs propres mitogènes sous la forme de p28sis. Avec une activité suffisante de p28sis, les cellules peuvent proliférer sans restriction, ce qui entraîne un cancer.
Deuxièmement, les cellules cancéreuses peuvent avoir des récepteurs de surface cellulaire mutés pour les mitogènes. Le domaine de la protéine kinase présent sur les récepteurs mitogènes est souvent hyperactivé dans les cellules cancéreuses, restant allumé même en l’absence de mitogènes externes. En outre, certains cancers sont associés à une surproduction de récepteurs mitogènes à la surface des cellules. Avec cette mutation, les cellules sont stimulées pour se diviser par des niveaux anormalement bas de mitogènes. Un tel exemple est le HER2, un récepteur tyrosine kinase qui répond au mitogène EGF. La surexpression de HER2 est fréquente dans 15 à 30 % des cancers du sein, ce qui permet au cycle cellulaire de progresser même avec des concentrations extrêmement faibles d’EGF. La surexpression de l’activité kinase dans ces cellules favorise leur prolifération. On parle alors de cancers du sein hormono-dépendants, car l’activation de la kinase dans ces cancers est liée à l’exposition à la fois aux facteurs de croissance et à l’œstradiol.
Troisièmement, les effecteurs en aval de la signalisation mitogénique sont souvent mutés dans les cellules cancéreuses. Une voie de signalisation mitogène importante chez l’homme est la voie Ras-Raf-MAPK. La signalisation mitogène active normalement Ras, une GTPase, qui active ensuite le reste de la voie MAPK, pour finalement exprimer des protéines qui stimulent la progression du cycle cellulaire. Il est probable que la plupart des cancers, sinon tous, présentent une mutation dans la voie Ras-Raf-MAPK, le plus souvent dans Ras. Ces mutations permettent à la voie d’être activée de façon constitutive, indépendamment de la présence de mitogènes.
Résistance aux antimitogènesModifié
La prolifération cellulaire est souvent régulée non seulement par des mitogènes externes mais aussi par des antimitogènes, qui inhibent la progression du cycle cellulaire au-delà de G1. Dans les cellules normales, la signalisation anti-mitogène à la suite de dommages à l’ADN, empêchant les cellules de se répliquer et de se diviser. Les cellules tumorales qui sont résistantes aux antimitogènes permettent au cycle cellulaire de progresser alors qu’il devrait être empêché par un mécanisme antimitogène. Cette résistance aux antimitogènes peut simplement résulter d’une surstimulation par des mitogènes positifs. Dans d’autres cas, les cellules tumorales possèdent des mutations de perte de fonction dans une partie de la voie anti-mitogène. Prenons l’exemple d’un anti-mitogène bien connu, le facteur de croissance transformant (TGF-𝝱). Le TGF-𝝱 agit en se liant aux récepteurs de la surface cellulaire et en activant les protéines régulatrices du gène Smad. Les protéines Smad déclenchent alors une augmentation de p15, qui inhibe la cycline D1 et empêche la progression du cycle cellulaire. Dans de nombreux cancers, il existe une mutation de perte de fonction dans les protéines Smad, ce qui annule l’ensemble de la voie anti-mitogène.
Mutations multiples requisesModification
Pas seulement une mais plusieurs mutations mitogènes sont nécessaires pour que le cancer prolifère. En général, les mutations multiples dans différents sous-systèmes (un oncogène et un gène suppresseur de tumeur) sont les plus efficaces pour provoquer un cancer. Par exemple, une mutation qui hyperactive l’oncogène Ras et une autre qui inactive le suppresseur de tumeur pRb est bien plus tumorigène que l’une ou l’autre des protéines seule.Les cellules tumorales sont également résistantes à la réponse au stress de l’hyperprolifération. Les cellules normales possèdent des protéines apoptotiques qui répondent à une surstimulation des voies de signalisation mitogènes en déclenchant la mort cellulaire ou la sénescence. Cela empêche généralement l’apparition d’un cancer à partir d’une seule mutation oncogène. Dans les cellules tumorales, il existe généralement une autre mutation qui inhibe également les protéines apoptotiques, supprimant ainsi la réponse au stress d’hyperprolifération.